Lactivisme

Publié le par Supermeuh

Militante, extrêmiste, intolérante, mère fusionnelle...

 

Rien n'est épargné à la mère qui allaite.

 

Il se trouve que oui, dans la société française de 2011, quand tu allaites plus de trois mois, tu es une militante. Ta seule existence est un acte de foi, de résistance. Ta seule présence interpelle, pose question, voire carrément dérange, et de ce fait attire sur toi les regards au mieux curieux, au pire suspicieux, avec leur cortège de remarques à la con.

 

Quel que soit l'âge de tes interlocuteurs, ils en ont toujours une bonne à raconter sur leur propre vécu d'allaitement. On voit tout de suite que c'est un sujet qui ne laisse pas indifférent, entre les larmes au fond de la voix et le regard brillant de bons souvenirs (c'est rare), en passant par la colère indignée (c'est moins rare) que tu allaites "encore!".

 

C'est que, bien sûr, toi, tu as "de la chance", tu as "assez de lait", tu as "un lait assez nourrissant  "enfin, pour l'instant, hein!), ou bien même peut-être tu as un bébé "sage", un bébé "facile", et non pas un affamé, un glouton, un gros bébé qui voudrait tout le temps téter et auquel le lait maternel ne suffirait pas...

 

Parce que tout le monde le sait bien l'allaitement c'est juste une espèce de procédé magique, qui marche uniquement avec les bons sortilèges, dans le climat de superstitions rituelles adéquates. On a "de la chance", ou bien on n'en a pas.

 

Et toi qui sais tout ce que la mise en route de ta lactation peut t'avoir coûté d'attention et de lâcher prise, de larmes, de séances en tête-à-tête avec ton ami le tire-lait, de tétées de nuit (- ah non, ça tu ne sais plus, tu dormais;-)-)  de moments de doute pour redresser le tir après tous les bons conseils que tu as reçu à la maternité pour foirer ta relation avec ton bébé, tu souris silencieusement, et tu te tais, en mettant ton bébé (voire même ton bambin, espèce de provocatrice) au sein. C'est parce que tu es une extrêmiste. Une sectaire. Tu allaites ton enfant rien que pour faire chier le monde et faire se sentir coupable toutes les autres mères qui n'ont pas eu ta "chance", ou qui n'ont pas "fait le choix d'allaiter".

 

C'est fou, tout de même, qu'il y ait en France, et pas ailleurs,non, curieusement, tellement de femmes "qui n'ont pas de lait". Il y a un truc dans les gènes, ou quoi? C'est à se demander comment le bon peuple de France a pu survivre et prospérer jusqu'à l'invention du biberon, et de la "sauce" qu'on met dedans.

Peut-être que c'est parce que ce n'est pas une bonne chose de donner 5 tétées par 24h à un bébé de quelques jours? Ou bien alors c'est parce qu'on ne se nourrit pas d'amour et d'eau fraîche, et qu'un bébé avec une tétine au bec est un bébé qui ne reçoit pas de lait au sein de sa mère?

Ou encore, soyons fou, parce qu'un bébé qui hurle à pleins poumons pendant des minutes entières (je suis optimiste) au fin fond de son berceau sans recevoir de réponse adéquate (I mean : une tétée) perd un nombre incommensurable de calories à s'exciter et s'égosiller tout seul, et que ça n'aide pas à grossir?

Ou enfin, à la fin du fin, peut-être parce que même un bébé au biberon mange au moins 6 à 8 fois par 24h les premières semaines, et qu'on a oublié de préciser aux jeunes mamans que oui, ces bêtes-là, il faut les nourrir ?

 L'allaitement, c'est simple : plus le bébé tète souvent et efficacement, plus il y a un bon transfert de lait. Sinon, moins y en a, moins y en a... bah vi.

 

Cet enfant qui se nourrit - encore - à ton sein, sans même que tu y penses plus que nécessaire, depuis de longs mois, qui y trouve le lait de  son espèce (la tienne, la mienne) , et qui l'y trouvera aussi longtemps qu'il aura besoin de lait et de se lover à ton sein pour se réconforter, cet enfant, donc, tu défends son droit à obtenir les meilleurs soins et la meilleure alimentaion possible, tel que défini dans la charte des Droits de l'Enfant. Pour nourrir son gros cerveau, il n'a pas besoin du lait destiné au petit veau. Ni maintenant, ni plus tard.

 

Tu es une vétérante. Une survivor. Tu appartiens au minuscule pourcentage des femmes françaises qui allaitent encore à 6 mois, à 12 mois, à 2 ans!  Et tes filles, lorsqu'elles te voient donner le sein à ton enfant, ancrent en elles ce message de bon sens : allaiter, c'est juste "normal", puisque Maman le fait!

Et tes fils se disent que plus tard, ils accompagneront leur femme dans son allaitement en la soutenant, physiquement, moralement.

Ton quotidien avec ton enfant allaité est la preuve banale de la continuité logique, physiologique,  qui lie grossesse et allaitement.

 

Oui, ta simple existence est un défi à la face de certains. Pour mieux répondre, parfois tu te documentes, tu t'informes, et petit à petit, tu deviens une lactiviste. Simplement.  Sans crier ni démontrer. Juste en exerçant tes compétences de mère et ton choix éclairé de parent.

Mais le plus sectaire, intolérant, extrêmiste des deux, est-ce toi, ou bien celui qui veut t'empêcher d'être libre en t'imposant sa superstition et ses croyances d'un autre âge, fruits des mensonges éhontés et mirifiques des fabricants de lait-en-poudre- de-perlimpimpin?

Publié dans allaitement on demand

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A
Bon bah en 2019 c'est toujours pareil, je me reconnais mot pour mot et du début à la fin dans ce discours!
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E
Ben tu sais, fallait juste 'finir' la moindre lactation...<br /> Par ailleurs j'avais l'impression, peut-être erronée, mais ça faisait son effet au moins sur ma façon d'envisager l'allaitement, que le lait que je lui donnais était imprégné des horribles journées<br /> de boulot que j'avais (quartiers nord marseille, enfer) cad de mes émotions pas bien agréables... et du désespoir qui allait avec. Alors...<br /> Et en plus je cumulais... vu que j'étais déjà veggie (et bio quand possible), je te dis pas ce que j'ai entendu - du côté de ma mère surtout - au sujet des 'laits' et autres nourritures que je<br /> donnais à GothMinou...et il a fallu convaincre le papa du gamin, c'était plus facile en fait, curieusement.<br /> Je devais être un dragon, peut-être bien :-)
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S
<br /> <br /> C'est comme ça que tu l'as vécu, et le principal, c'est que tu aies donné à ton enfant (rrhhoo, il est grand tout de même maintenant!!) ce que tu te sentais prête à lui donner, tant que cela<br /> correspondait à ce que tu avais choisi. C'est ce qui me semble primordial.<br /> <br /> <br /> <br />
E
Bah dis donc, j'ai pas ressenti ça en 1986; bon à la reprise du taf bébé avait 5 mois, j'ai continué la tétée du matin et les 2 du soir autant que j'ai pu, quelques semaines, je me souviens que la<br /> nounou de GothMinou m'aida ensuite à bander mes seins pour 'finir' et que je trouvais ça tout bizarre...
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S
<br /> <br /> Les temps sont durs.. Mais bon, bander les seins, c'est pas mal non plus, mmmhhh. J'espère que tu n'as pas trop souffert... Ce genre de pratiques ont la vie dure, c'est dommage,  1986 c'est<br /> pas non plus il y a si longtemps!<br /> <br /> <br /> <br />
L
A ce tarif là, lactextrémisme en avant !<br /> L'humanité s'en trouvera meilleure !<br /> <br /> Faut pas déconner quand même, ce regard porté sur la mère allaitante en France, c'en est épuisant.<br /> Courage, c'est ce qu'il y a de mieux pour les n'enfants.
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S
<br /> <br /> toi, tu es un super-héros marié à une déesse-vache, ou je ne m'y connais pas!! ;-)<br /> <br /> <br /> <br />